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Martin Lefebvre, diplômé en génie mécanique, vient de soutenir sa thèse sur un sujet en phase avec la transition écologique : l'étude d'un matériau composite à base de fibres de lin et de résine recyclable, toutes deux produites par des entreprises françaises. Ce nouveau matériau biosourcé pourra-t-il remplacer les matériaux actuels à base de fibre de verre, de polyester et époxy ?

Par Stéphanie Robert

« Je suis normand d’origine, et la Normandie est la première région productrice de lin à l’échelle mondiale. Sa valorisation me tient à cœur. C’est une fibre végétale très porteuse et à fort potentiel industriel, dont la culture n’est pas polluante et qui possède de très bonnes qualités mécaniques, proches de la fibre de verre. C’est une avancée en plein essor. C’est en plus une manière de relocaliser un savoir-faire » explique le jeune docteur.

Matériau biosourcé et recyclable

C’est grâce à un cours sur les biomatériaux à l’INSA Strasbourg, alors qu’il étudiait le génie mécanique, qu’il prend connaissance de ce potentiel. Un de ces cours est donné par Nadia Bahlouli, spécialiste en la matière, qui dirige l’équipe Matériaux multi-échelles et biomécanique du laboratoire ICube. Elle deviendra sa directrice de thèse. Cet intérêt rencontre un autre : le projet de recherche Elcod qui consiste en la mise au point d’un drone ultraléger, longue distance et autonome. Martin Lefebvre y a participé en 2018, au cours de son projet de fin d’études, puis d’un contrat d’un an comme ingénieur d’études. Il était chargé de la réalisation du prototype.

« J’ai souhaité poursuivre le développement de ce projet en thèse. Celle-ci consiste en l’étude mécanique d’un nouveau matériau prometteur : un composite biosourcé, à base de fibres de lin et de résine recyclable, toutes deux fabriquées par des entreprises françaises, respectivement EcoTechnilin et Arkema. Il pourrait remplacer les matériaux à base de fibre de verre, polyester et époxy, qui sont non recyclables, pour fabriquer le drone, et plus largement dans l’industrie. Les fibres de lins apportent la résistance et la résine les solidifie » poursuit Martin.

Drone en vol (crédit Martin Lefebvre)

Drone en vol

Drone : prototype en instance de décollage (crédit Martin Lefebvre)

Drone : prototype en instance de décollage

De l’échelle nanoscopique à l’échelle macroscopique

Pendant un an, il affine le projet et recherche des financements. Sa thèse démarre en 2019, financée par un contrat doctoral du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche. « J’ai cherché à caractériser et à renseigner ce composite à différentes échelles, de l’échelle nanoscopique à l’échelle macroscopique. J’ai observé le matériau et ses composants élémentaires au microscope électronique à balayage. Puis, j’ai réalisé des séries de tests de traction et compression à différentes vitesses pour déterminer la résistance, le comportement de la fibre, et disposer d’un modèle. Pour chaque échelle, j’ai associé expérimentation et observation » détaille-t-il.

Grâce à données, Martin Lefebvre a pu tester virtuellement  un drone fabriqué avec ce matériau composite biosourcé en réalisant une simulation numérique. « Comme j’avais conçu les moules pour réaliser le prototype, j’ai pu créer la géométrie et appliquer les propriétés du biomatériau que j’avais définies. Nous avons déterminé le niveau de chargement que pouvait supporter le drone. En définitive, le biomatériau rivalise en traction, mais il reste à améliorer le comportement sous la compression. En poids, le gain est de 10%. Pour des petites structures comme le drone, il répond aux attentes, mais pour l’automobile ou l’aéronautique, il reste des verrous à lever. Pour de nombreuses applications, il peut remplacer les matériaux actuels pétrosourcés » estime-t-il. D’autres travaux de recherche verront la fabrication et le test réel du drone écoconçu.

« Mon ambition est de rapprocher recherche académique et innovation industrielle »

Martin Lefebvre a présenté ses travaux dans plusieurs congrès internationaux, notamment les conférences et compétitions internationales Imav (International Micro Air Vehicle), et dans deux publications en cours. « Mon ambition est de rapprocher recherche académique et innovation industrielle, si possible dans les matériaux biosourcés. Mon rêve serait de participer à un projet innovant comme la réalisation du catamaran écoconçu We Explore, pour la dernière Route du Rhum. La plus grande pièce en fibres de lin jamais produite ».


La thèse de Martin Lefebvre – Sur une approche multi-échelle de l’influence de la vitesse sur le comportement mécanique d’un composite biosourcé Lin/Elium, thèse dirigée par Nadia Bahlouli (Université de Strasbourg), co-encadrée par Renaud Kiefer et Marc Védrines (INSA Strasbourg), soutenue le  8 décembre 2022.

Martin Lefèbvre

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